Petite cuillère du XIXème siècle en bronze très patiné. Le cuilleron creux et concave montre des traces manifestes de façonnage manuel artisanal. Il est fermement solidaire du manche sur tout son diamètre, ce qui est caractéristique des productions indiennes. Son origine est aussi confirmée par la présence de décors : deux paons gravés en position symétrique, tête tournée vers l'extérieur, et l'extrémité du manche qui se termine par un serpent naja dressé.
Cette cuillère dite à "Puja" était destinée à un officiant (Pujari) pour oindre la représentation d'une déité hindoue (le plus souvent statue consacrée ou Shiva Lingam) avec un liquide précieux (huile, lait ou même eau lustrale) La Puja est un processus quotidien, réalisé dans un temple ou plus modestement sur un autel domestique, comme marque de dévotion (offrande) et plus étonnamment avec l'objectif de manifester l'incarnation des pouvoirs de la divinité dans l'objet. En vertu du fait que l'apparente finitude de la matière comporte toujours un infini transcendant qu'il suffit de révéler par le rituel adéquat : on parle de "Archāvatara Bhagavan", ce qui a le sens de faire descendre le bienheureux (la réalité ultime) par l'intercession de l'image de la déité sur laquelle la Puja est dirigée. Ainsi au terme de la Puja, les fidèles s'approprient intérieurement la vision de l'idole incarnée ou de son avatar (le Darshan = perception du Divin), ce qui peut éveiller des expériences spirituelles intenses, réparer le corps et l'Esprit allant jusqu'à des guérisons.
L'ornement du manche avec des paons évoque le Vahana (véhicule) du dieu Skanda ou bien de la très populaire déesse Sarasvati. Tandis que le naja nous amène au serpent mythique Shesha (Sheshanaga = le naga éternel, celui qui reste)